Nouvelliste du 17.09.15 - La Haute Route boudée cet été

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arollablabla
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  Nouvelliste du 17.09.15 - La Haute Route boudée cet été

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La Haute Route boudée cet été

La canicule n'a pas réussi à faire oublier les nuages du franc fort. Sur l'itinéraire d'alpinisme entre Chamonix et Zermatt, on fait grise mine.

Les pentes de la Haute Route n'ont pas échappé aux règles de l'économie. L'itinéraire symbolique de haute montagne qui relie les deux capitales de l'alpinisme Chamonix et Zermatt en cinq à six jours a été littéralement boudé cet été. Tout était pourtant réuni pour que cet été fasse oublier le mois de juillet pourri de 2014. Un ciel radieux, des conditions optimales et stables, l'envie de fuir les températures caniculaires, voilà qui aurait pu pousser les alpinistes en herbe vers les hauteurs. C'était sans compter sur l'effet du franc fort. "C'est dire, j'ai mieux travaillé au mois de juillet l'an passé alors que j'ai fraisé la neige pendant 20 jours devant la cabane. Sur la Haute Route, j'ai perdu 40% de clientèle" , déplore, dépité, le gardien de la cabane des Vignettes Jean-Michel Bournissen.

Le franc fort désigné coupable

Lui, la Haute Route c'est son fonds de commerce. Perchée à plus de 3000 mètres d'altitude, sa cabane se situe au carrefour des glaciers et constitue un passage obligé du mythique itinéraire. Sur les 6000 nuitées qu'il réalise par année, il en doit bien les deux tiers à ce tracé qui attire plus de 4000 personnes par an, à skis de randonnée l'hiver et à pied l'été. "L'hiver, on a beaucoup de Nord-Américains ou de clients issus des pays scandinaves. L'été en revanche, c'est surtout des Français, des Italiens et des Espagnols et pour eux on était déjà cher et on l'est encore davantage. C'est ma pire année en 13 ans de gardiennage" , regrette celui qui vient de redescendre de son nid d'aigle. Autre problème, les clients de la zone euro qui font malgré tout le déplacement dépensent le moins possible sur place. "Alors que c'est justement la base de notre revenu. On ne touche qu'une rétribution sur les nuitées et ce n'est pas ça qui nous fait vivre. A 80 francs la demi-pension, on est beaucoup trop cher. Qu'on ne me dise pas que le franc fort n'y est pour rien."

Président de la commission des cabanes de la section Monte Rosa du Club alpin suisse, à laquelle appartient la cabane des Vignettes, Philippe de Kalbermatten reconnaît la situation difficile et la juge assez généralisée. "On sait qu'il y aura une baisse des nuitées et c'est paradoxal parce que tout semblait parfait pour cet été. On ne peut que l'attribuer à une situation économique", admet-il. Lionel May, président de la société des guides de Verbier qui emploie près de 90 professionnels de la montagne, fait part du même désarroi. "L'économie est la seule explication. Nos groupes collectifs pour la Haute Route ne sont pas partis. C'est la première fois que ça arrive depuis très longtemps. Franchement, ce n'était vraiment pas un bon été."

Clients redirigés ailleurs

De l'autre côté de la frontière, le directeur de la compagnie des guides de Chamonix et de ses 240 membres est on ne peut plus catégorique. "La Suisse est tout simplement devenue beaucoup trop chère et cela concerne tous les secteurs, du transport à la bouteille d'eau. Sur un produit spécifique comme la Haute Route, les clients renoncent" , relève Yann Delevaux, guide de montagne et directeur de la compagnie. Et d'indiquer qu'il redirige ses clients vers d'autres destinations, comme le Grand Paradis en Italie. A titre de comparaison, la société a mené 5 groupes d'alpinistes entre Chamonix et Zermatt cet été, contre 14 l'an passé. "Avec un mois de juillet qui était pourtant vraiment horrible."

Quelques exceptions

Cette sinistrose, tous ne la partagent pas. En contrebas de l'itinéraire de la Haute Route, Raymond Angéloz, le gardien de la cabane d'Orny a le sourire. Dans cet écrin pris entre le glacier et les voies d'escalade, l'été a été excellent. "On reste d'ailleurs ouvert jusqu'à la fin du mois, même s'il n'y a que dix ou quinze personnes, c'est ça qui nous fait vivre aussi", souligne-t-il. S'il ne nie pas que la clientèle européenne s'est effritée, il appelle à rester positif. "Il faut garder le sourire et expliquer les choses aux gens. Nous avons soigné l'accueil et tenté, par des petits gestes comme offrir le thé, d'apaiser la situation. De toute façon, on n'a pas le choix" , conclut celui qui va terminer, avec son épouse, sa 29e année de gardiennage.

Julien Wicky

La baisse de clientèle évoquée sur ce tracé de haute montagne est de l'ordre de 40% dans certaines cabanes, dont celle des Vignettes...
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